galerie les Chantiers Boite Noire

Lucien Pelen

Le portfolio

Lucien Pelen

 

Pour un pont

 

Je suis là, la tête contre la fenêtre et les pieds dans le tuyau du poêle. J'entends les chèvres racler du dos, les trompettes couiner dans les tunnels.

La journée est à la brume et enfin le rideau se lève.

Me voilà sur les lieux, d'en bas je ne peux voir le haut. Enfin cela se dégage un peu et je me lance entre deux trains.

C'est une douche froide, un baptème autoproclamé,

me voilà a deux doigts.

Ceci est un Pont.

 

 

Balais en montagne

 

Et s'il fallait recommencer, tout revoir et tout reprendre,

je me prendrais alors en couleur,

j'attendrais la tombée du soir,

je me mettrais nu.

Je me sentirais capable de repeindre le monde, et je m'attacherais à la contemplation des lumières restantes, qui pourtant ne reviendront pas.

Je laisserais mon corps s'apaiser et se courber comme une virgule, dans son bronzage agricole.

Je me sentirais ridicule et prétentieux, et je rejoindrais ma voiture un peu plus loin en contrebas sur la route.

Je repeindrais la nature d'un gris gazole et pétrole. 9893 MX 13

 

 

Déjeuner

 

Par l’ombrelle qui coupe l’esprit des plafonds, et les bois qui portent le creux d’amont en aval par ces jours de crue,

Par la porte de la peinture ouverte,

Je laisserai mon cul tremper dans l’histoire de cet art, et vous le dis Madame :

Que la toile m’emporte !

 

 

Illuminé

 

Retourne à la grotte à sonner les grelots,

En attendant que le berger passe et ramasse son troupeau.

Jouant du balai, tapant des couvercles, je mange la terre à mes pieds, frappe du front dans le ciel.

L’heure est à la cloche ce que les moulins sont aux vents.

 

 

Merlin

 

« Alors ! comme qu’il disait

Prenant sa hache et frappant la terre au sein du monde

Ceci est un merlin ! »

Déracinant le ciel et injuriant les dieux, il voulait rendre à la terre sa dimension gazeuse, en cherchant par son corps à faire passer la foudre.

Nu, non loin de quelques habitations non guères connues, sous l’œil peut-êtrede quelques paysans, avec qui il aurait naguère pu discuter et à qui, sans doute, doit-il son aspiration à repenser la terre.

Ils sont loin et proches maintenant, comme cette distance qui sépare la hache de la terre en cherchant à y refendre le ciel, « Alors ! … »