galerie les Chantiers Boite Noire

Christophe Sarlin

Christophe Sarlin

Marie de Brugerolle, http://www.20qmberlin.com/bilder/sarlin/zqm_ChristopheSarlin.pdf

 

« Comme j’ai parlé auparavant du fait qu’il n’est pas possible de rien prouver, définir, étudier, saisir, toutes les définitions restent donc sans preuves, car, si quoi que ce soit avait été prouvé, cela le serait, bien entendu, pour l’Univers et pour elles-mêmes. De là il découle que toute preuve est la simple apparence de ce qui n’est pas prouvable.

L’homme appelle toute apparence objet ; ainsi l’objet n’existe pas dans le prouvable et l’improuvable »

K. Malévitch

 

 

Les Modules de Christophe Sarlin appartiennent à cette catégorie d’objets qui se présentent à nous sous les aspects d’une forme précise, dont la fabrique et la composition sont descriptibles mais dont la fonction demeure mystérieuse. Module n°3, Attaques spéculatives auto-réalisatrices, régime de fixité du taux de change est un des petits éléments présentés sous vitrine. Cette sculpture de petite taille : 25 x 4 x 1 cm est en pierre de synthèse blanche (du Corian, une association de minéraux naturels et de Polymère acrylique pur).

Sa matière absorbe la lumière et permet de mieux révéler les angles des différents niveaux de la surface. La forme provient d’un protocole emprunté aux statistiques : le système PROBIT. Il permet de modéliser le monde en récupérant des données économiques existantes, qui sont traitées afin d’anticiper le futur. On peut penser au principe d’équivalence de Robert Filliou, économiste converti à l’art. Ici l’outil de l’enquête est perverti pour créer des formes uniques, même si produites en série. Leur unicité vient du procédé même de la taille au laser, qui permet d’en fabriquer plusieurs, certes, mais dont le coût et la précision restent de l’ordre de l’artisanat. Il ne s’agit pas de planification mais de scénario, « avec toujours cette idée de rapport au temps qui prédomine » dit encore C.Sarlin. Le dispositif qui consiste à introduire des éléments plausibles, confortés par des preuves non vérifiables, relève de l’anticipation.

Comme chez Bioy Casarès ou Borgès, C. Sarlin joue avec le lecteur-spectateur, tissant une fiction à partir d’un réel pseudo scientifique ou documentaire. Que ce soit l’interview de Mme Salinger, une installation sculpturale, des affiches, les œuvres de Christophe Sarlin combinent la fiction et les formes géométriques. « Le modernisme me plait bien car il inclut la notion d’Histoire en marche. La période que nous vivons aujourd’hui n’est pas qu’une période de crise économique, c’est une évolution historique. Après, il apparait que la période postmoderniste est aujourd’hui terminée. On ne peut pas être post-post-moderniste. Il faut passer à autre chose. »

Cette autre chose pourrait être la modernité, comme projet inachevé.