galerie les Chantiers Boite Noire

Julien Tiberi

Représenté à Paris par Sémiose galerie

 

Le travail de Julien Tiberi croise avec une aisance peu commune les signifiants parfois confidentiels auxquels ses dessins réfèrent tant sur le plan de l’image qu’au niveau textuel. Cette mise à distance de l’évidence de l’image passe également par une distorsion des codes esthétiques en vigueur dans le dessin contemporain si l’on considère la virtuosité avec laquelle le jeune artiste a intégré l’univers graphique des grands illustrateurs du XIXe siècle. Pastichant la technique d’un Daumier, il affronte ainsi le procès en appel d’Ivan Colonna à la cour d’assises de Paris en mars 2009 où il assume le statut de dessinateur de presse le temps de séances qui donneront lieu à la série Les fantômes de la défense.

Ce brouillage des temporalités propre à l’ensemble de son travail décourage toute approche immédiate. L’avènement du dessin est lui-même retardé puisque dans plusieurs de ses travaux on ne se frottera guère à un original mais à une copie sous forme de double imprimé ou photographié. La série récente ironiquement nommée L’histoire véritable tire son titre d’un conte utopique antique de Lucien de Samosate qui anticipa le premier voyage sur la lune. L’ensemble de dessins qui en découle, et dont il ne subsiste que des impressions, emprunte son iconographie à l’exposition collective, entendue ici comme mode de représentation. La progression du texte littéraire est ainsi suggérée à travers les vues d’une exposition fictive qui présente des oeuvres réelles du XXIe siècle, restituées avec un graphisme hachuré en noir et blanc affichant toutes les qualités du dessin du XIXe siècle. Julien Tiberi renvoie le travail de figures actuelles telles que Raymond Petibon ou Simon Starling avec lequel il partage une complexité de pensée dans une dimension temporelle hypothétique où le réel est complètement désubstantialisé par la fiction. Il en résulte des images secrètes et crépusculaires qui interrogent les usages et le devenir de l’oeuvre d’art et, en particulier, ceux du dessin, tout en conférant à ce dernier une nouvelle opacité.

 

Catherine Macchi, octobre 2009 (extrait du texte de l’exposition Hypothétiques, Atelier Soardi)